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1,3 : vue de l'exposition

2 : Erased Graffiti (Julie-Wolfthorn Straße 1.2), 2010 - Sprühfarbe - 240x210cm

4: Erased Graffiti (Julie-Wolfthorn Straße 1.1), 2010 - Sprühfarbe - 350x120cm

5 : Cache colonne, 2010 - Holzpaneel, Wandfarbe - 100X100X200cm

6 : Erased Graffiti (Julie-Wolfthorn Straße 1.3), 2010 - Sprühfarbe - 240x210cm

7 : Line Graffiti (Kreis), 2010 - Wandfarbe -ø 270cm

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ERIC EMERY

VILLE PROPRE

16 décembre 2010 - 28 janvier 2011


Sur le site web de la ville de Clermont Ferrand, on peut déjà trouver un avant goût du travail d'Eric Emery :

« Depuis 2000, la Ville de Clermont-Ferrand a engagé un programme d’effacement des tags et graffitis sur son patrimoine mais aussi sur les façades du patrimoine privé visibles depuis l’espace public, et installé soixante-dix-neuf panneaux d’affichage à la disposition des associations. »1

L’incessant travail de nettoyage et effacement dont les villes font preuve depuis 10 ans environ en Europe est une réalité ancestrale en Suisse. Villes propres, gens propres, idées propres, mots propres… même le chocolat y est blanc !

Emery efface et propose une mise en abîme de cela, non sans faire penser au jeune Rauschenberg et son effacement d'un dessin de Kooning en 1953. Exposer l’effacement du graffiti. Iconoclaste ? Non, car le geste se réfère à la culture du signe.

Un geste téméraire ? Absolument pas. Plutôt un geste initiatique.

Le début d’une histoire par l’effacement, presque efficace, de son passé. La trace reste, mais elle est support d’une nouvelle pensée. Une pensée grise par son support même.

Emery s’éloigne donc de la neutralité suisse pour poursuivre sa quête à Berlin depuis quelques années.

Berlin est en Europe un symbole clair et net de cette ambivalence entre histoire et mémoire, construction du futur et conservation du passé. Berlin en tant que « Vanitas » géo-historique.

Ainsi ce lien à l’Est et à la pornographie du passé innommable nous conduit à la splendide série des disparitions de porno star. Dans un décor bien reconnaissable les scènes osées deviennent nuage. Elément gazeux qui par son évanescence nous parle de Baumann et de la modernité liquide dans laquelle nous sommes contraints de vivre.2

Par la négation de la narration3, notre société a perdu tout socle (église, père, famille… )

et nous renvoie constamment à la liquéfaction des repères institutionnalisés.

Comme de multiples Paris Hilton, les figures effacées d’ Emery nous parlent du post-contemporain, de la violence du lieu, du corps et de sa linguistique primaire.

Un post-contemporain né de cet effacement du sujet pour redessiner des sujets.

Une nation neutre, une ville tragiquement historique et symbole de « Mecque culturelle » maintenant dans les envies de tout adolescent, des stars du porno, des symboles année ’80 effacés : des reconstructions de l’histoire par le pouvoir du langage.

Bien plus que des surfaces à prendre. Des surfaces à reprendre !

Ainsi nous regardent ces blancs  sur blanc, dans le gris d’Emery. 


Jean-Marie Reynier,

curateur indépendant



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Notes :

1 http://www.clermont-ferrand.fr/Enlevements-des-tags-graffitis-et.html

2 Zygmunt Bauman, Modernité et holocauste, La Fabrique, 2002 , rééd. Complexe, 2009

  Zygmunt Bauman, La Vie liquide, Le Rouergue/Chambon, 2006

3 Walter Benjamin, Je déballe ma bibliothèque, traduction Philippe Ivernel, Rivages poche / Petite Bibliothèque,    octobre 2000.